HomeAfricaPensée impériale

Par Michel-Ange Cadet

Haiti Chery

Nègres, negro: voilà comment ils nous appelaient. Pas pour designer notre personne mais surtout pour affirmer une quelconque prétention de suprématie dont ils croyaient être détenteur et au nom de laquelle nous devions les servir, travailler à leur gré et satisfaire touts leurs caprices, richesses, gloires, plaisirs… Ils voulaient nous faire croire que notre vie se résumait à une simple pigmention de la peau qui nous privait de tout: de tout ce qu’un être devrait avoir pour vivre comme un homme ou une femme doué d’une conscience et de raison. Tout est néant depuis que la peau n’est plus pale. Ce groupe d’individus, ces nations qui ont mis en extinction toute une civilisation du nouveau continent, nous nous souvenons. Pendant plusieurs décennies le monde a connu cette conception, ces atrocités à l’égard des autochtones de l’Amérique et de l’homme noir de l’Afrique.

Néanmoins, voir les choses uniquement de la sorte serait éluder un peu l’essence même de la pensé impériale. Il ne saurait y avoir de Spartacus si les motifs de leurs actions étaient seulement une question épidermique. Rome ne saurait dominer presque toute l’Europe et l’Asie pendant plusieurs siècles. Les raisons profondes sont en effet autres qu’une simple couleur de la peau, qu’un préjugé racial. Leurs intérêts pour l’homme, les races humaines, et les nations se réduisent à ce que ces hommes peuvent leur rapporter. L’appétit pour l’or, la richesse, la gloire, et pour dominer et assujettir constituent l’essence même de l’idéal impérial.

02_Gerard_MachannFwiLa proclamation de l’indépendance d’Haïti avec de la poudre et au prix du sang marqua au 19e siècle le début de la décolonisation physique de l’Amérique. Un nouvel ordre mondial est alors en train de se dessiner aux regards inquiets de certains traditionalistes. Le status quo de l’Amérique s’effondra et avec lui toutes les richesses qu’il représentait pour les géants impériaux. Il faut des correctifs. Des alternatives contre les révolutions qui s’effectuent dans les Caraïbes, l’Amérique Latine et dans certains pays de l’Afrique pour lesquels des intérêts sont considérables. Le colonialisme doit changer de posture, être moins visible et plus discret à travers ses faits et gestes. Nous pouvons dire qu’il sagit d’une violence masquée dans leurs désirs afin d’éviter qu’une autre terrible révolution ne revienne pour tout chambarder. Les colonies, surtout l’âme coloniale, au-delà de la décolonisation physique des Etats de l’Amérique, des Caraïbes et de l’Afrique, doivent subsister. C’est de là que toute une série de théories, de politique économique et d’organisations internationales œuvrent pour maintenir aussi longtemps que possible cet idéal impérialiste.

L’histoire de la révolution de Saint-Domingue, aujourd’hui la République d’Haïti, révèle la position de classe qu’affirmait le général Laplume vis-à-vis des insurgés, en combattant manu-militari ses frères de couleur et de sang. Interprétons-le comme nous le voulons, trahison ou reconnaissance servile; les réactions, les motivations de l’homme ne sont pas toujours compréhensibles au simple regard. Mais l’histoire raconte et essaie de nous faire comprendre les évènements, comme nous l’espérons tous, pour ne point commettre les mêmes erreurs du passé dans l’avenir. L’histoire est un perpétuel recommencement, dit-on souvent. Jean Baptiste Conzé répéta cette histoire durant l’occupation américaine (Haïti, 1915-1934) en trahissant le chef des insurgés d’alors: Charlemagne Péralte. Serions-nous donc surpris que des contemporains en fassent autant? A présent les sbires du néo-colonialisme sont ceux qui ont accédé aux fonctions les plus hautes et prestigieuses de la nation, ceux que nous avons pris peine de supporter et de designer par nos doigts. Leurs beaux discours nationalistes cachent très mal de nos jours l’odeur perfide de la nouvelle forme du colonialisme et de leurs nouveaux maitres étrangers.

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Notre autodétermination est compromise. L’indépendance est un leurre qu’ils cherchent à nous faire croire habilement quand, derrière de soi-disant institutions démocratiques et d’idéal de partage de pouvoir, existent de solides ficelles. Nous ne décidons plus de nos orientations, de ce que nous voulons, de ce qui nous ferait du bien. Ils s’en fichent complètement de notre dignité de peuple puisque tout ce que nous représentons n’est autre qu’un marché lucratif. Comme au temps des colonies le commerce avec le nouveau monde rapporte gros. Nulle notion de justice, d’équité n’y figure. C’est la pauvreté planifiée, et de l’autre coté la richesse assurée. La notion de justice dans les pays du tiers monde renvoie à une double problématique. Le système politique et économique imposé par le nouvel ordre économique mondial crée non seulement une disparité entre les nations riches et les nations pauvres dans leur relation de dépendance, mais aussi il alimente le clivage qui existe entre les différentes classes sociales. Le néo-libéralisme n’a-t-il pas prôné un désengagement de l’Etat dans les activités sociales au nom d’une théorie de réglementation des dépenses publiques? De l’autre coté, nous assistons à la détérioration des termes de l’échange dont le néo-libéralisme et toutes les politiques qui l’accompagnent alimentent d’année en année en une extrême pauvreté, les disparités sociales et économiques, et de ce fait, éloignent les perspectives d’une justice sociale. Ils ne veulent pas que nous supportons nos secteurs de la production tandis qu’ils soutiennent les leurs.

OLYMPUS DIGITAL CAMERADepuis des siècles les pays du Nord mènent une guerre voilée contre ceux du Sud. Mais il s’agit plutôt en fait d’un massacre. Toutes sortes de politiques institutionnelles, économiques, de théories et d’ajustements structurels, des ingérences politiques grossières sont mises en œuvre pour assoir leur domination et leur exploitation à outrance. Rien ne les retient pourvu qu’ils parviennent à leurs fins. Quand ces griffes s’enfoncent dans notre chair et que coule notre sang, nous ne pouvons nous empêcher de crier haut et fort à de telles souffrances, de telles calamités d’une avidité sans limite du néo-colonialisme. Mais quand nous crions, nous ne pleurons pas. Plutôt nous nous défendons comme nous l’avons déjà fait, comme des pays de l’Amérique Latine et des Caraïbes le font actuellement.

Une fois de plus, les masques sont en train de tomber et le dessous des rideaux montre les véritables acteurs, artisans de malheur des peuples opprimés. Jamais les noirs de Saint-Domingue ne s’étaient abandonné à leur sort; “à la résignation ils ont préféré l’attente et la révolte” disait Aimé Césaire. L’heure de l’attente est révolue! Nous avons le droit de définir notre destin. Ne nous appelle plus des nègres. Nous sommes vos égaux. Nous sommes des hommes et des femmes de couleurs noirs. Nous sommes des Caraïbes, de l’Amérique du Nord, de l’Amérique Latine, de l’Afrique. Nous sommes surtout des Haïtiens et Haïtiennes. Nous sommes “Haïti!”

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Sources: Michel-Ange Cadet est né à Cap-Haitien, où il a effectué ses études primaires et secondaires respectivement chez les frères de l’Ecole Joseph et au Collège Notre Dame du Perpétuel Secours. Très vite il a pris gout au mouvement d’organisation de jeunes où il est actuellement membre du Groupe de Recherche en Développement Economique et Social d’Haïti (GREDESH) après ses études supérieures en Sciences Economiques. | Toutes les images proviennent des tableaux de Gerard Fortuné. | Cet article est également disponible en anglais à News Junkie Post.


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